Le somnambulisme, les cauchemars
et les terreurs nocturnes chez l’enfant
Le contenu de cet article est extrait du livre « Aider mon enfant à mieux dormir », de Brigitte Langevin.
Formatrice, conférencière et coach pour l’apprentissage du sommeil des enfants.
Auteur de plusieurs livres à succès sur les sommeil des enfants et des adultes, aux Éditions de Mortagne.
Le somnambulisme
De 10 à 15% des enfants entre 6 et 15 ans vivent des épisodes occasionnels de somnambulisme et environ 5% sont somnambules plus de 15 fois par année. Il se manifeste généralement en début de nuit, au moment où le dormeur est en sommeil profond (un stade atteint lors du sommeil lent). À son réveil, l’enfant n’en garde aucun souvenir.
Un épisode de somnambulisme peut se résumer à s’asseoir dans son lit, manipuler les couvertures, balayer la pièce d’un regard absent, puis simplement se recoucher et se rendormir. L’agissement le plus fréquemment rapporté est celui de l’enfant qui sort de son lit et se promène lentement dans la pièce. Même s’il regarde droit devant lui, son regard est vide et il semble se déplacer sans intervention consciente. Il agit en donnant l’impression d’aller accomplir quelque chose. On peut lui parler et il répondra, mais souvent de façon incompréhensible ou inappropriée. La plupart des épisodes sont de courte durée (quelques minutes), sans gravité et ne nécessitent aucun traitement, sinon d’identifier la cause. Il peut s’agir d’un déficit en sommeil ou l’expression d’un stress important.
Comment réagir ? Il n’y a pas grand-chose que l’on puisse faire. Il n’est pas conseillé de réveiller l’enfant, car il serait confus et n’aurait aucun souvenir de l’épisode. D’ailleurs, il ne saurait pas ce qu’il cherchait ni ce qui l’a amené dans cette pièce. Il y a lieu de le raccompagner à sa chambre, sans l’obstiner. On doit absolument veiller à la sécurité d’un enfant qui se déplace pendant son sommeil : installer une barrière au sommet de l’escalier ou à la porte de la chambre, des verrous sécuritaires aux fenêtres et aux portes. Également, il peut s’avérer utile de fixer à la porte de la chambre de l’enfant une clochette qui prévient les parents qu’il se lève.
Tandis que les épisodes de somnambulisme sont plutôt bénins et inoffensifs chez les enfants, ils sont parfois accompagnés de blessures physiques chez les adolescents (ils se blessent eux-mêmes et non les autres), car ces derniers plus grands et plus forts sont généralement plus aventureux et plus agressifs. Il est conseillé de ramener le dormeur doucement dans son lit en lui chuchotant à l’oreille de se recoucher et en le rassurant qu’on va s’occuper de ce qu’il allait faire. Si les crises sont fréquentes (trois fois par mois et plus), il est recommandé de consulter un médecin.
Les terreurs nocturnes
Un autre état particulier du sommeil concerne les terreurs nocturnes. Elles se produisent généralement en début de nuit, une à deux heures environ après l’endormissement de l’enfant. Ce dernier est alors en sommeil lent. De façon générale une crise de terreurs nocturnes ressemble à ceci : l’enfant crie, pleure à l’occasion, s’assoit dans son lit, regarde fixement, se débat parfois, transpire beaucoup, respire de façon saccadée, son cœur bat rapidement. En fait, il semble apeuré et ensuite tout bonnement, il se couche et se rendort. Le lendemain, il ne se souvient de rien. Pour leur part, les parents se souviennent de façon très vivace de cette vision troublante de leur enfant en proie à une terreur nocturne.
Or, 5% des enfants vivent des terreurs nocturnes
Lorsque les terreurs nocturnes se produisent chez un enfant de plus de six ans, on doit envisager certains facteurs psychologiques. À cet âge, les terreurs nocturnes peuvent être attribuables au stress ou à une expérience angoissante. Souvent, l’enfant réagit de façon normale durant le jour et la terreur nocturne est la seule manifestation d’un problème sous-jacent. Dans ce cas, l’intervention d’un thérapeute pourrait être bénéfique.
Comment réagir ? Tout comme pour le somnambulisme, il est conseillé de parler à l’enfant doucement et lentement, de lui caresser le bras ou le front, sans toutefois le réveiller ; cela peut l’aider à réintégrer un sommeil paisible. Il est suggéré par ailleurs de lui chanter une berceuse, celle qu’il avait l’habitude d’entendre lorsqu’il était petit. Cela peut s’avérer suffisant pour le rassurer et lui permettre de retrouver un sommeil calme. Le plus souvent, l’enfant ne semble pas réagir à la présence d’une autre personne. La meilleure attitude est d’attendre la fin de l’épisode en s’assurant que l’enfant ne se blesse pas, notamment s’il se débat beaucoup.
Les cauchemars
Le cauchemar est un rêve dont le contenu est troublant ou angoissant. Il est défini comme trouble du sommeil, car il réveille celui qui en est sujet. Les cauchemars sont très fréquents chez les enfants.
La période de trois à six ans est celle où les cauchemars font le plus fréquemment leur apparition. Or, plus l’enfant est jeune, plus il rêve souvent et longtemps. Les nouveaux-nés, et en particulier les prématurés ont, en fait, les périodes de sommeil paradoxal (sommeil de rêves) les plus longues. Quelle que soit la durée totale de son temps de sommeil, le nouveau-né passe une grande partie en sommeil paradoxal, de 50 à 65% pour un total approximatif de neuf heures par jour. Pour un enfant de 2 à 5 ans, le temps de rêve s’abaisse à 25 ou 35% du temps de sommeil (environ deux heures et demie) ; l’enfant de 5 à 13 ans ne rêve plus que pendant 20 à 25% de son temps de sommeil (une heure et demie).
Nous ignorons si les périodes de sommeil paradoxal chez le bébé sont accompagnées d’une imagerie mentale. Nous ne sommes pas en mesure de le vérifier. Cependant, dès l’âge de 1 an à 2 ans, des enfants rapportent des rêves, ils sont donc susceptibles de faire également des mauvais rêves et des cauchemars. D’ailleurs, dans la majorité des cas, ils se souviennent davantage des rêves effrayants ou frustrants que des rêves agréables ou neutres. Il est facile de reconnaître un enfant qui vient de faire un cauchemar ; il s’éveille en sursaut, anxieux et peut être en pleurs. Il lui faudra du temps pour être rassuré et comprendre que ce qui l’a effrayé dans son rêve ne s’est pas vraiment passé, qu’il ne s’agit que d’un mauvais rêve. Le contenu des cauchemars s’élabore généralement comme suit[2] :
- Deux ans : peur d’être mordu, mangé ou attaqué ;
- De trois à cinq ans : présence d’animaux puissants et méchants ;
- De six à 12 ans : figures humaines menaçantes, étrangers malveillants, bêtes étranges et dangereuses ;
- De 13 à 16 ans : des scénarios reflétant le rejet, le ridicule, le découragement, le manque d’estime de soi, l’emprise et même la dépression.
La fréquence des cauchemars décroît habituellement avec l’âge et les expériences sont peu à peu oubliées. Néanmoins, il est important de vous assurer que les histoires que vous racontez à votre enfant ou les vidéos qu’il visionne ne comportent pas de sujets potentiellement effrayants.
Comment réagir ? Chez le jeune enfant, les cauchemars représentent en général des peurs non contrôlées. Quand survient un cauchemar, la meilleure attitude est avant tout de le réconforter et le rassurer. Ensuite, faites-lui raconter son cauchemar, approuvez ses réactions et au besoin, inspectez sa chambre pour le rassurer. S’il a plus de cinq ans, il est possible de l’aider à distinguer le rêve de la réalité. Enfin, suggérez à votre enfant de faire appel aux pouvoirs magiques de ses héros pour lui porter secours dans ses rêves. Des histoires touchant le sommeil, disponibles en librairie, fournissent aux enfants des modèles à imiter pour apprivoiser le sommeil et surmonter les menaces du cauchemar.
Chez les plus vieux, le cauchemar traduit parfois l’étape difficile de l’adolescence (bouleversement des premiers amours, intégration dans un groupe, etc.), met en évidence certains événements familiaux douloureux (séparation des parents, maladie d’un proche, alcoolisme ou violence familiale, etc.) ou encore est en lien avec les scénarios de violence visionnés à la télévision. La meilleure stratégie est de l’écouter et de l’aider à associer les sentiments ressentis dans le rêve à une situation de la vie éveillée qui suscite le même état affectif. Par exemple, s’il raconte avec horreur avoir vu en rêve quelqu’un se faire ravager le visage par un procédé quelconque et tout à coup perdre la face, vous pourriez lui demander s’il vit présentement une situation qu’il qualifie d’horrible dans laquelle il semble perdre la face. En effet, les personnages d’un rêve reflètent souvent une partie de soi.
[1] Dr Susan E. Gottlieb, Les problèmes de sommeil des enfants, Éditions de L’Homme, 1998, p. 157.
[2] Patricia Garfield, Comprendre les rêves de vos enfants, Marabout France, 1997, p.88.
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